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20 mars 2006

Le Quotidien / Le coucher / The nightmare part2



Salut!

Voilà la suite sur "le coucher", toujours sortie d'un devoir rendu sur le quotidien; un exemple concret, en M.E.C.S., d'une réflexion sur une pratique éducative institutionnelle:

Je souhaite également faire part d’une réflexion, qui a eu lieu en équipe, sur une de ces pratiques des éducateurs qui ne semblait pas avoir besoin d’être interrogée, puisque tous la partageaient. Un quart d’heure avant leur départ, à 22h30 dans le meilleur des cas, tous -y compris moi-même- prenions le temps d’aller dire bonne nuit à chaque jeune dans sa chambre. Ceci nous semblait important dans le sens où, après des soirées épuisantes à devoir faire de la surveillance et de la discipline, ce moment était l’occasion privilégiée pour être dans une relation individuelle avec chaque usager. Ces instants étaient essentiels pour nous car ils nous permettaient de quitter les jeunes dans de « bonnes » conditions ; le simple fait de leur souhaiter une bonne nuit leur indiquant que les disputes qui avaient pu précéder ne faisaient pas de nous des « ennemis aux intentions malveillantes ». Cependant il ne s’agissait pas uniquement de dire « bonne nuit », mais aussi de serrer la main des garçons et de faire la bise aux filles (ce qui est la pratique générale des éducateurs pour dire bonjour et au revoir aux jeunes de l’établissement). Or cette pratique a fait l’objet d’une réflexion dans un autre groupe, qui était aussi concerné par celle-ci, le groupe des petits, qui accueille les enfants âgés de quatre à dix ans. Les éducateurs, après l’arrivée de nouveaux jeunes dans leur groupe, avaient observé que le « bisou du soir » énervait ceux-ci. Ils s’étaient étonnés que ces enfants puissent alors avoir des comportements érotiques. L’enfant les prenaient dans leurs bras et il était arrivé que l’un deux exécute des frottements masturbatoires. De cet étonnement a émergé l’idée qu’embrasser un jeune dans son lit le soir n’était pas interprété -ou vécu- de la même façon par le jeune et par l’éducateur. Ce constat, soulevé en séminaire clinique, c’est à dire lors d’une réunion qui réunit l’ensemble des éducateurs de la Maison d’Enfants, ainsi que les chefs de service et les psychologues, a rappelé à tous que la chambre était un espace privé, et que la problématique souvent sexuelle du public que nous accueillions pouvait nous laisser penser, a priori, que cet espace avait pu être violé auparavant. Il fallait donc leur restituer cet espace en cessant ces pratiques. La plupart des éducateurs continuaient cependant à défendre cette pratique en argumentant sur le fait qu’elle traduisait une demande de la part des jeunes, qui pouvaient s’expliquer par les carences affectives dont ils avaient été « victimes ». En outre, comment expliquer aux jeunes que l’on n’irait plus le soir leur souhaiter « bonne nuit » dans leur chambre ? Au terme de cette réunion, chacun s’est engagé à essayer, dans son groupe, à ne plus dire « bonne nuit » aux jeunes dans leur chambre, mais éventuellement dans les pièces collectives. Dans les faits, ceci n’a nulle part posé de difficulté de la part des jeunes. Il a suffi aux éducateurs de leur signifier verbalement que désormais ils leur diraient « bonne nuit » en dehors de leur chambre, ce qui n’a soulevé aucune objection de la part des jeunes. Les éducateurs se sont alors aperçus que cette pratique n’était pas l’expression d’un besoin des jeunes, mais plutôt celle des éducateurs, et l’expression de leur affection plutôt que celle de leur professionnalisme. C’est évidemment un constat très difficile à accepter, d’autant plus que cette pratique était partagée par l’ensemble des éducateurs, et n’avait de ce fait jamais été remise en question. Cet exemple montre bien la nécessité pour l’éducateur de toujours s’interroger sur sa pratique, et de lui donner du sens en prenant en compte sa mission et le respect de l’usager. S’il est vrai que les éducateurs ne disent plus « bonne nuit » aux jeunes dans leur chambre, la pratique qui consiste à leur dire « bonjour » et « au revoir » en leur serrant la main, ou en leur faisant la bise -qui a parcouru les débats lors la discussion que nous venons d’évoquer- semble oir été laissée de côté. Cela montre à quel point il est difficile de remettre en question une pratique quotidienne qui s’inscrit dans les habitudes institutionnelles.

4 commentaires:

Anonyme a dit…

cette reflexion m'en amène une autre, ne peut-on pas dans ces conditions agir lors des couchers de facons différentes avec chaque enfant. tous n'ont pas été victimes d'abus sexuels.
Je m'interroge aussi sur le bonjour quotidien, bises que je fais aux jeunes. Il est vrai que cela m'a déjà interpellé, professionnellement nous devons constament questionner le sens de nos actions. C'est à nous alors de pouvoir comprendre quels sont les enjeux pour le jeune lors de ces "embrasades". Quelle est la relation établie entre le jeune et l'éduc? quelle est son histoire,mais aussi quelle est la notre? à quel moment peut-il y avoir confusion pour le jeune, ou pour l'adulte? c'est ici toute la difficulté de notre job, être proche sans trop l'être. il s'agit alors de parler de l'empathie, juste dose dans l'écoute et la relation. bien que très souvent critiqué les réunions avec les psy sont de réels outils pour nous aider à nous questionner sur notre pratique, encore faut-il s'en servir correctement et accepter de parler de soi et non pas que de l'autre.

Ababakar a dit…

Salut
Voici une réflexion que je partage entièrement.. si tu es bien qui je crois ça ne m'étonne pas!
N'hésite pas à indiquer ton non, ou un pseudo.
Ah l'empathie je maitrise pas encore le sujet, et donc je ne vois pas encore bien si elle peut jouer un rôle ici, en l'occurence au moment du bonjour.
Pour les réunions psy, je suis assez d'accord, même si je vois que travailler avec ces professionnels est beaucoup décrié..moi je ne veux pas cracher dans la soupe: le psy(chanalyste) de mon institution m'a beaucoup appris, et ses interventions résonnent souvent plus quand elles n'ont l'air de rien. La seule chose que l'on peut reprocher aux psy, mais c une généralité, cest de parfois de nous déposséder d'un peu de pouvoir..mais c'est un autre sujet!

Ababakar a dit…

oh les fautes..

Anonyme a dit…

et si un éducateur comme de par hasard, ne faisait pas la bise ou ne serrait pas la main dans sa vie privée???Devrait il le faire dans sa vie professionnelle?
Comment cela serait perçu?le plus gros soucis ne serait il pas le regard des autres professionnels? Différents styles d'éducation, différentes cultures, traumatismes de l'enfance, choix personnel.....
Un petit peu trop de questions peut être j'en suis confuse,
Sympas ce blog, merci pour le partage d'infos!