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31 mai 2009

Départs N°12 et 13. Marco et Cécilia. Le Guet-apens


Salut'

Dimanche soir dernier, ma collègue a été interpelée par une éducatrice d'un autre groupe, à la recherche d'une jeune fille de 17 ans, Leila, arrivée nouvellement en urgence sur son propre groupe, et disparue depuis une petite heure.

Or les studios des jeunes que j'accompagne en semi-autonomie sont le lieu rêvé pour trouver refuge..

Ma collègue fait le tour des studios (notons que nous avons un passe) et se trouve finalement dans l'impossibilité d'ouvrir celui de Marco, jeune garçon de 18 ans, ce dernier ayant apparemment (encore) changé le barillet de sa serrure.

Certaine que Marco est chez lui, ma collègue tambourine à la porte, et il finit par ouvrir au bout de plusieurs minutes. Leila est là (leila ouhouhouhouh ouhouhouh) ma collègue est très en colère et la fait sortir manu militari.

Hum..je dois préciser que les jeunes en studio n'ont pas le droit d'accueillir des jeunes des autres groupes, encore moins du sexe opposé..

Dans la nuit, une autre jeune de mon service, Cécilia (18 ans), affirme à une surveillante de nuit posséder une vidéo de Marco et Leila "ensemble", ce dont la surveillante de nuit nous informe via un rapport informatisé dont je prends connaissance le lendemain matin.

Le soir même, alors que je passe devant la structure en rentrant chez moi, je vois un gros attroupement d'une vingtaine de personnes très énervées : Marco, Cécilia, Leila et sa mère sont là, quelques éducs et un tas de jeunes. Je m'arrête et je file un coup de main à mes collègues pour dissiper un peu le groupe, "rentrer les jeunes", et je constate que Cécilia est à la fois très en colère et meneuse de toute cette petite troupe qui s'acharne crescendo contre "la nouvelle" depuis une semaine, Leila.

Comme j'essaie d'isoler Leila en la prenant à part et en tentant de discuter avec elle, je m'aperçois qu'elle refuse toute responsabilité dans l'évènement du soir, ce qu'elle me répète plusieurs fois en hurlant, autant à destination des autres jeunes que moi : "J'ai rien fait de mal moi! C'est pas moi qui me fait enc.. c'est pas moi qui me fait enc. par Marco etc.. " sic

Finalement tout le monde se disperse, je laisse le relai à mes collègues qui s'en sortent très bien et je rentre chez moi.

Le lendemain est notre jour de réunion d'équipe hebdomaire. J'en apprends bien plus sur la situation. J'apprends notamment (les sources sont floues) qu'un vidéo tourne sur les portables des jeunes ; le sujet de la vidéo : "Marco et Leila en pleine scène de sodomie dans le studio de Marco" Il semble que Cécilia soit la réalisatrice et à l'origine de la diffusion. Nous comprenons aussi qu'il s'agit d'une video réalisée sans le consentement de Leila, piégée par Marco et Cécilia, cachée dans sa salle de bain (en compagnie d'une autre jeune fille de 15 ans qu'elle a sous sa coupe..)

Dans la même matinée de réunion, Cécilia, en formation, nous appelle pour nous demander si nous pouvons lui apporter son portable ce midi sur son lieu de formation , elle l'a oublié chez elle..
Au delà même de cette situation et de cette demande pour le moins inhabituelle et curieuse, nous avons dès lors ce portable sous la main. Qu'en faire?

Décision d'équipe, chef de service présent, nous fouillons dans le portable, à la recherche de la vidéo. Après quelques tribulations dues à des écueils technologiques, nous trouvons la vidéo, dont les quelques secondes entre-aperçues non sans répugnance ne laissent pas de doute sur les protagonistes et les lieux.

Nous informons le directeur de la situation, de la vidéo en notre possession. Nous apprenons en même temps qu'une plainte a été déposée par la mère de Leila (contre qui? pour quoi?) L'affaire prend une tournure très compliquée.

La réponse de la direction ne se fait pas attendre. Marco et Cécilia sont exclus dans la foulée. La vidéo doit être effacée.

Fin?


14 mai 2009

Evolution, dérive, crise?

Il y a encore quelques années, les situations financières critiques étaient rares auprès des jeunes femmes que nous accueillions.




Je me souviens de K. qui avait une dette SNCF de 800 euros. Enooorme! Elle était partie "dans le Sud" (parce que l'herbe y est plus verte?) sur un coup de tête, sans billet de train. Puis elle est revenue, elle n'avait pas l'argent pour payer l'amende et sa dette avait été transférée au Trésor Public.





Ensuite, C., deuxième cas isolé, un ou deux ans plus tard. Elle avait demandé une carte de crédit et quand elle l'a eue, elle a acheté tant qu'elle a pu pendant deux jours. Yihou! fringues, coiffeur, chaussures et resto, la grande vie, quoi! Elle savait bien qu'elle n'avait pas l'argent sur son compte, mais ça continuait à fonctionner! Je ne me souviens plus du montant du découvert bancaire, quelques centaines d'euros, voire un petit millier?



Puis, ces situations sont devenues un peu plus fréquentes avec les dépassements de forfaits de téléphonie mobile, et la valse de courriers de pression et de menaces d'huissiers appréciée de ces chers opérateurs..

Et aujourd'hui, nous gérons toute une flopée de situations de ce genre. Les plus courantes sont les dettes de transport en commun. Chez les jeunes femmes, nous entendions beaucoup dire il y a quelques temps: "surtout ne paie pas, une fois que t'es fichée, ils te retrouvent et ils te prennent tout, faut jamais faire ça". Aujourd'hui, elles se sont rendu compte que payer tous les mois, 35 euros (c'est le minimum accepté pour un échéancier T.P.), même pendant 2-3 ans, ben.. ça fait mal!


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Mais ce qui m'inquiète, ce n'est pas tant la multiplication des dettes, c'est surtout leur banalisation.

Il y a encore cinq ans, autant dire hier, nous aidions les jeunes femmes à économiser la somme de leur unique amende Trspl de 22 euros sur une ou deux semaines afin de pouvoir régler au plus vite. Au pire, nous les laissions se rendre seules au service contentieux pour tenter de négocier une baisse. Elles devaient alors s'expliquer elles-mêmes. Nous estimions que si elles n'avaient pas acheté leur titre de transport alors que la somme suffisante leur était distribuée chaque semaine, elles étaient capables d'en assumer les conséquences.

Il y a quelques semaines, autant dire aujourd'hui, nous en sommes à rédiger au mieux une demande argumentée d'échéancier au Trésor Public pour que le paiement s'échelonne le plus possible, tout en demandant parallèlement à la société de transport de ne pas transférer trop vite la dette au service de recouvrement.

Non pas que nous nous sommes habitués, mais ces situations récurrentes plongent parfois les filles dans un tel marasme, que nous pensons qu'il est utile de les accompagner dans ces démarches, tout en poursuivant le discours "quand on pose des actes, on les assume ensuite".

Pour d'autres, ça leur passe vraiment au-dessus de la tête, mais alors très très loin au-dessus, et si nous ne les interpellons pas sur le sujet, elles repartiront avec leurs enveloppes de relances non ouvertes, estampillées Trésor Public - République Française; pour celles qui ne les jettent pas dès leur réception.. pour ne surtout pas voir.